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mardi 20 janvier 2015

Et maintenant...?

Crédit photo : Cyril Bonnet, pour Nouvel Obs
Nous sommes aujourd’hui à J+13 du début des attentats qui ont touché la France, et plus particulièrement Paris. On a pu constater l’élan de fraternité, de solidarité et d’unité toute la semaine, et surtout le 11 janvier, lors de la Marche Républicaine, dont je vous parlais ICI. Nous avons toutes et tous, ou presque, scandé « Je suis Charlie », que ce soit sur les réseaux sociaux ou dans la rue, en exprimant notre solidarité un peu partout en France, notamment sur la Place de la République. Mais qu’en est-il actuellement, et qu’en sera-t-il demain ?

Charlie Hebdo et les autres
Mais à J+13, alors que les choses commencent peu à peu à rentrer dans l’ordre, la liste d’attente pour le Charlie Hebdo post-événements est toujours aussi longue. Certains, qui n’avaient jamais entendu parler du journal satirique, se sont littéralement rués sur les nombreux kiosques parisiens. D’autres ont continué à lire les journaux qu’ils avaient l’habitude d’acheter, voire pas du tout. Et ce sont eux, finalement, qui ont eu raison. Oui, c’est beau d’avoir voulu aider et soutenir Charlie Hebdo, mais le soutien ne doit pas s’arrêter à une sorte d’engouement effet « mouton ». La presse écrite, quelle qu’elle soit (satirique ou non, de gauche comme de droite, féminine ou masculine, musicale ou littéraire), agonise et vit en grande partie des donations de lecteurs et des publicités publiées dans leurs pages. L’aider devient une nécessité, attentats ou non.

Crédit photo : JDD
Alors oui, je suis très fière d’avoir vécu ces élans de solidarité, mais qu’en sera-t-il de la situation financière de Charlie (et des autres !) dans 2 mois, 8 mois, 1 an ? C’est à ce moment-là qu’il faudra regarder en arrière et se dire qu’on a été bêtes d’acheter la presse, que dis-je de se jeter sur Charlie Hebdo, pour finalement à peine le feuilleter et ne plus jamais racheter un seul exemplaire… Le soutien et l’unité ne doivent pas être un phénomène de masse. Ceci doit être accompli avec une profonde conviction. Celle de faire bouger les choses.

Les amalgames et la haine de ceux qui se disent vouloir vivre ensemble
A peine avons-nous su que ces attentats avaient été commis par des terroristes que beaucoup ont commencé les amalgames. Je trouve inadmissible et terriblement triste que des citoyens français de confession musulmane aient « dû » se justifier comme quoi ils étaient musulmans mais n’approuvaient pas les actes de ce début du mois de janvier.

Il est déjà inadmissible de tuer quelqu’un pour de simples dessins, mais il est d’autant plus grave que ces actes aient des répercussions sur un groupe d’individus, quels qu’ils soient.
On a vu lors de la Marche du dimanche des gens d’origines et de confessions très différentes aux bras les uns les autres. C’est magnifique, oui ! Mais il est dommage que ces personnes aient besoin de se montrer face caméra pour que les propos haineux s’arrêtent. Il suffit de flâner sur les réseaux sociaux. Le nombre de tweets, de statuts, de photos ou de billets de blog aux propos racistes, antisémites et islamophobes sont de plus en plus nombreux. Honte à ceux qui les écrivent, mais également, voire encore plus, honte à ceux qui les relayent grâce (ou plutôt à cause) de la fameuse mention « J’aime ».

Avant de prétendre vouloir vivre ensemble, intégrons la véritable signification des mots tolérance et respect.

La liberté, jusqu’où ?
Le respect, justement… L’action de respecter se définit dans le dictionnaire du Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales comme étant de « Considérer quelqu'un avec respect, porter une profonde estime à quelqu'un, le traiter avec égards en raison de son âge, sa position sociale, sa valeur morale ou intellectuelle ». Par conséquent, je respecte celles et ceux qui n’ont pas voulu être Charlie.
D’un point de vue strictement personnel, les dessins de Charlie Hebdo m’ont toujours (ou presque) fait rire. Mais je peux comprendre qu’ils n’aient pu plaire à certains, voire les blesser. De ce fait, je n’ai pas insulté ou traité d’insensibles les personnes qui ne sont pas Charlie.

Crédit photo : 20 Minutes
Ne pas être Charlie ne signifie pas être du côté des terroristes et encourager les actes d’attentats. Ne pas être Charlie ne signifie pas être contre la liberté d’expression. Ne pas être Charlie signifie simplement ne pas approuver les caricatures et satires. Et dans le pays des Droits de l’Homme, chacun est libre de penser que quelques hommes, qu’ils soient caricaturistes, journalistes ou autres, sont allés un peu loin. Et écouter les avis de ceux qui ne sont pas Charlie s’avère très intéressant. Alors si quelqu’un ouvre un jour la conversation à ce propos avec vous, ne soyez pas borné et écoutez jusqu’au bout ce que cette personne a à vous dire. Car si certains ont pu être attristés et choqués de ces caricatures, ils n’approuvent pas les meurtres, les tueries, les barbaries. Il suffit juste de tendre l’oreille et d’accepter que notre voisin ait une opinion divergente. N’est-ce pas également ça, la liberté d’expression ?

Et n’oubliez pas que comme tout droit, la liberté d’expression a des limites, lesquelles sont fixées par des lois, notamment l’article 11 de la DDHC (1789) ou encore la loi Gayssot (1990), entre autres. Alors ne stigmatisons pas celles et ceux qui refusent d’être Charlie.

La liberté à travers le monde
A l’heure où la France et ses alliés géopolitiques (l’Allemagne, les Etats-Unis, etc…) se battent et manifestent pour cette fameuse liberté d’expression, certains pays se battent pour leur liberté « tout-court ».
Qu’en est-il des lycéennes enlevées au Nigeria par Boko Haram, en avril 2014 ? Qu’en est-il de ces enfants en Syrie qui sont obligés de vivre sous les bombes, tous les jours, depuis déjà bien trop longtemps, et qui, pour certains, n'ont jamais connu la paix ? Qu’en est-il de ces journalistes de Corée du Sud qui, ayant contourné la censure, sont torturés et humiliés en prison ? Qu’en est-il de ces millions de personnes qui ne mangent pas à leur faim ?

Lutter contre le terrorisme en France, et plus généralement en Occident, est primordial, oui. Mais fermer les yeux sur toutes les immondices et les injustices perpétrées dans le monde est inconcevable. On ne peut pas « être Charlie » et ne pas vouloir voir la vérité en face sur ce qui nous entoure.

Je suis Raif
Affiche créée par Amnesty International
Raif Badawi, saoudien de 30 ans, est le lauréat 2014 du prix pour la liberté de la presse (par Reporters Sans Frontière). Sur son blog, il a eu le malheur d’avoir partagé son ressenti et ses doutes concernant les libertés fondamentales en Arabie Saoudite et sa société en général (religion, politique, société, etc…). Son site (Liberal Saudi Network) est actuellement interdit et Raif est emprisonné depuis 2 ans. Il a été condamné à 10 ans de prison et 1000 coups de fouet. Afin de « donner l’exemple », le gouvernement saoudien a souhaité que ce jeune homme ne meurt pas sous le fouet. De ce fait, il recevra 50 coups de fouet chaque semaine, en public, le vendredi, devant une des mosquées de Jeddah.

Puisque la liberté d’expression et la liberté de vivre ne doivent pas se limiter à Charlie Hebdo, n’oublions pas toutes ces personnes partout dans le monde, de tout âge, de toute religion, qui sont enlevées, frappées, humiliées, fouettées, torturées et tuées pour avoir voulu vivre, donner leur avis et tenir tête aux fous qui souhaitent tirer les ficelles du monde.

Je termine ceci par une pensée chaleureuse et un immense merci, du fond du cœur, aux journalistes qui partent dans des zones dangereuses pour pouvoir nous mettre au courant de ce qui se passe dans le monde. Ces hommes et ces femmes risquent leur vie pour que nous ne demeurions pas aveugles. N’oublions jamais les sacrifices de certains.

9 commentaires:

  1. Un très bon article, très bien écrit et présenté, et surtout très intelligent et juste.
    Il est très important de soutenir la presse écrite, car elle est vitale à la démocratie.

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    1. Merci Armelle !
      Oui, en effet, un pays sans presse n'est pas réellement un état libre !

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  2. Super article Ariane, tu écris d'une façon très mature pour une jeune femme de 19 ans (prends-le comme un compliment, j'adore ta manière d'écrire, et ton français). Bisous <3

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  3. Merci pour cet article. Quand je dis que je ne suis pas Charlie, je me fais limite huée ... Certains devraient prendre exemple sur ta manière de penser.

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    1. Merci à toi, Quérine. Il est vraiment primordial, à mon sens, d'écouter ce que les gens ont à dire, qu'on soit de la même opinion ou non.

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  4. Il faudrait que je m’inscrive aussi sur ce site ^^
    J’ai trouvé un autre test sur un site et je suis Serpentard ^^ xD

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  5. Un grand bravo pour ton article !
    Je suis d'accord avec ce que tu écris là.

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